INITIATIVE FRANÇAISE POUR LES RÉCIFS CORALLIENS

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COMITÉ DE SAINT-MARTIN

L’île de Saint-Martin (54 km2 pour la partie française et 39 km2 pour Sint Maarten) possède un milieu marin très diversifié : les formations coralliennes occupent une superficie supérieure à 19,4 km² pour l’ensemble de l’ile. Elles comprennent des formations non bioconstruites sur substrat rocheux qui prédominent sur le littoral et autour de l’îlet Tintamarre. Les formations coralliennes bioconstruites sont de deux grands types :
• les récifs frangeants présents sur des fonds d’environ 10 m ;
• les récifs barrières occupent les fonds d’environ 20 m et abritent une plus grande biodiversité.

Les herbiers occupent 62 km2 pour l’ensemble de l’île, dont 2,2 km2 dans la réserve.

Les mangroves couvrent une superficie de 24,2 ha (31 ha avant le passage de l’ouragan Irma). Elles sont principalement situées en bordure des étangs et autour du lagon central de Simpson Bay.

CARTOGRAPHIE

Carte des habitats de Saint-Martin - EDS 2020

PROGRAMME D'ACTION LOCAL

Pour voir ou revoir les précédents programme d’action (rattaché à la Guadeloupe) :
> Programme d’action 2011-2015
> Programme d’action 2006-2010
> Programme d’action 2000-2005

ECOSYSTÈMES ET BIODIVERSITÉ

ÉCOSYSTÈMES

Saint-Martin abrite deux grands types de milieux renfermant plusieurs unités écologiques possédant des structures et fonctionnements propres :
Le milieu marin :
– les herbiers de phanérogames marines
– les formations coralliennes
Le milieu terrestre :
– les formations végétales xérophiles littorales
– les mangroves

LES ÉCOSYSTÈMES MARINS
Ces écosystèmes côtiers des récifs coralliens et des herbiers de phanérogames marines constituent des habitats privilégiés pour de nombreuses espèces marines ; ils sont, de plus, à la base de nombreux services écosystémiques, et de nombreuses activités économiques et sociales.

Formations coralliennes
Les communautés récifales de St-Martin se répartissent du nord-est à l’est de l’île dans la zone protégée par la Réserve Naturelle. Ces communautés sont de deux types (Bouchon et al. 2002) :

– les formations coralliennes bioconstruites qui correspondent aux récifs frangeants et à leurs pentes externes. Les colonies sont généralement de petites tailles et la croissance récifale est réduite à part pour les formations de Corail cornes d’élan (Acropora palmata) et de Corail cornes de cerf (A. cervicornis).

– les formations coralliennes non bioconstruites ne bâtissent pas de récifs sensus stricto mais se développent sur des massifs rocheux et les gros blocs d’éboulis en continuité avec le littoral. Leur extension en mer est très limitée relayée rapidement par des herbiers sous-marins. Ces coraux sont présents de façon plus étendue autour de l’îlet Tintamarre, et au niveau des dalles rocheuses en sub-surface alternant avec de grandes étendues sableuses et des herbiers.

Herbiers de Phanérogames marines
Les phanérogames marines sont des plantes à fleurs marines ou estuariennes qui forment de véritables « prairies sous-marines » sur les fonds sédimentaires meubles, appelées herbiers.

À la différence des algues, les phanérogames marines possèdent des racines, rhizomes, tiges, feuilles, fleurs et fruits. Ces herbes marines se multiplient par reproduction sexuée (pollinisation sous-marine) ou par voie végétative à partir de morceaux de rhizomes et de racines. Ce formation sont à Saint-Martin constituée par :

– les herbiers dominés par « l’Herbe à tortue » Thalassia testudinum présents entre 1 m et 12 m de profondeur, sur substrat préférentiel composé de sédiments variant des sables grossiers envasés à la vase meuble. Les herbiers à Thalassia testudinum considérés comme le stade climacique dans l’évolution des communautés d’herbiers de la Caraïbe ;

– les herbiers « d’Herbes à lamantin » Syringodium filiforme plus profonds, en général entre 12 à 20 m de profondeur, y formant des pelouses clairsemées ;

– l’espèce Halodule wrightii observée en limite de rivage dans des zones peu profondes ;

l’espèce exotique Halophila stipulacea originaire de l’océan Indien et de la mer Rouge et signalée à St-Martin en 2011 (Willette et al. 2014). Cette espèce est présente à des profondeurs très variables (de -5 à -22 m) et se reproduit principalement par multiplication végétative. Sa progression est lente mais cet herbier a pu coloniser pas moins de 5 nouveaux sites à St-Martin en l’espace de 2 ans et aucune régression n’a été observée lors de l’étude de 2014.

Ces prairies sous-marines sont néanmoins sensibles à de nombreuses pressions, qu’elles soient naturelles (tempêtes, cyclones, tsunamis, herbivorie…), anthropiques (envasement, arrachage, piétinement, dragage, eutrophisation …), directes ou indirectes.

 

LES ÉCOSYSTÈMES TERRESTRES
Les formations végétales de l’ile de St-Martin sont sous la dépendance de trois ensembles de contraintes écologiques : climatiques, géomorphologiques et anthropiques. Deux grandes unités écologiques de végétation terrestre sont recensées : la forêt sèche et les formations végétales xérophiles du littoral (Imbert 2003). Des mangroves sont également présentes aux abords des étangs/lagunes et du littoral.

Les mangroves
La mangrove est constituée de plantes ligneuses, appelées palétuviers, qui se développent à l’interface entre la terre et la mer, le long des côtes protégées des zones tropicales et subtropicales. L’écosystème de mangrove est le lieu de rencontre des eaux douces de ruissellement et des eaux marines salées apportées par le courant de marée. Les palétuviers présentent des adaptations morphologiques, biologiques et physiologiques qui leur permettent de supporter des conditions environnementales particulièrement contraignantes d’un point de vue climatique (températures de l’air et de l’eau élevées, influence du vent, tempêtes tropicales), édaphique (sols salés, meubles, vaseux, en quasi-anaérobie, alternant des périodes de sécheresse et d’inondations) ou hydrologique (influence des marées, apports d’eaux douces) (Odum et al. 1982, Kathiresan et Bingham 2001). Les mangroves font partie des écosystèmes les plus productifs au monde, avec une production primaire comparable à celles des forêts tropicales.

Deux morphotypes de mangroves sont présents à St-Martin (Impact Mer et al. 2011a) :

– la mangrove arbustive qui est la plus courante et dont la présence traduit des impacts de déboisements (défrichements, cyclones…) ;

– la mangrove arborée qui est moins fréquente et observée dans les zones abritées (abords de l’étang aux Poissons, étang de la Barrière). En réserve, les mangroves bordant l’étang des Salines d’Orient sont composées principalement de palétuviers blanc (L. racemosa), noir (A. germinans) et gris (C. erectus) avec quelques grands palétuviers blancs (8 à 10 m) en arrière de la Baie Orientale. Avant le passage du cyclone Irma, la plus grande surface de mangroves était observée autour de l’étang aux Poissons (15 ha) composée essentiellement de palétuviers rouges (R. mangle) au niveau de l’embouchure de l’étang. Les palétuviers rouge, blanc et noir arbustifs constituent environ 4500 m du linéaire de mangroves bordant l’étang (Impact Mer et al. 2011a).

BIODIVERSITÉ

A St-Martin près de 35 espèces de coraux sont recensées sur les récifs frangeants et les formations coralliennes non bioconstruites (RNSM 2017, Bouchon et al. 2002).

En région Caraïbe, les espèces de phanérogames marines correspondant aux herbiers appartiennent à 4 genres (Syringodium, Halophila, Thalassia, Halodule). A St-Martin, 4 espèces d’herbes marines sont recensées dont 3 espèces natives (Thalassia testudinum, Syringodium filiforme, Halodule wrightii,) et une espèce exotique (Halophila stipulacea) (IFRECOR 2016). Il est avéré que H. stipulacea interfère avec la dynamique naturelle des herbiers natifs et modifie la structure des communautés benthiques (Moisan 2014, Willette et al. 2014). L’espèce H. stipulacea présente un potentiel invasif important et des études visant à connaitre les facteurs favorisant son expansion ainsi que ses impacts sur les écosystèmes marins sont nécessaires (Moisan 2014).L’espèce native Halophila decipiens est relativement rare dans les Petites-Antilles et serait potentiellement présente à St-Martin compte tenu de sa distribution géographique (Short et al. 2010). A ce jour, cette espèce n’a pas été recensée dans la réserve lors des différentes prospections et missions réalisées (Fanny Kerninon, com. pers. 2018). Ces espèces d’herbes marines se répartissent suivant la bathymétrie du milieu et peuvent former des herbiers monospécifiques ou mixtes (Hily et al. 2010).

Les mangroves constituent des habitats importants pour les populations de poissons en tant qu’abris, zone de nurserie, d’alimentation et de reproduction (Nagelkerken et al., 2008). Quatre espèces de palétuviers se répartissent suivant des conditions écologiques du milieu définies par la salinité et l’immersion (Imbert et al 1988, Bonnissent et al 2003, Tab. 26) :
le palétuvier rouge Rhizophora mangle se développe en bordure des étangs ou des côtes et affectionne les sols salés et constamment inondés. Ce palétuvier est caractérisé par des racines aériennes de type échasse qui partent du tronc ou des branches et qui permettent de soutenir l’arbre se développant sur un fond meuble et vaseux ;
le palétuvier noir Avicennia germinans est caractérisé par la présence de nombreuses racines souterraines qui émergent à la surface : les pneumatophores. Ces racines aérifères permettent au palétuvier de se développer sur un sol relativement sec, sursalé, pauvre en éléments nutritifs et épisodiquement inondé ;
le palétuvier blanc Laguncularia racemosa est situé sur des sols peu salés avec davantage d’apports d’eau douce provenant des eaux de ruissellement ;
le palétuvier gris Conocarpus erectus se trouve sur des sols bien drainés, non inondés et peu salés, parfois aux abords des plages.

Situés à l’interface entre les milieux terrestres et marins, les écosystèmes de mangrove présentent une grande biodiversité floristique et faunistique. Cette diversité est caractérisée par la présence d’organismes terrestres (insectes, oiseaux, mammifères,…) et aquatiques.

Les racines immergées des palétuviers et les fonds sablo-vaseux de mangrove servent d’habitats à de nombreux organismes, tels que : des algues, des éponges, des mollusques bivalves ou gastéropodes, des crustacés (amphipodes, crabes, crevettes,…), des échinodermes, des poissons. L’écosystème de mangrove est particulièrement important pour l’avifaune qui y trouve un refuge, une aire d’alimentation et de reproduction. Des espèces d’oiseaux nichent dans les palétuviers (Aigrette neigeuse Egretta thula thula, Bihoreau violacé Nyctanassa violacea bancrofti, Bihoreau gris N. nycticorax hoactli) ou au sol à proximité des mangroves (Echasse d’Amérique Himantopus m. mexicanus, Gallinule d’Amérique Gallinula galeata cerceris) (Caroline Fleury, com. pers. 2018).

Nombre d’espèces marines et niveaux de complétude

LES SERVICES ECOSYSTÉMIQUES

Les récifs jouent un rôle physique de protection du littoral en atténuant les actions de la houle et des cyclones. Cet écosystème procure une ressource alimentaire importante pour les populations locales (poissons, invertébrés).
De plus, les récifs coralliens ont un intérêt culturel et socio-économique primordial pour les îles ultra-marines où ils participent fortement au développement économique local.

Il a été évalué qu’ils produisent chaque année un total de 27 M€, avec une estimation minimum de 19 M€ et un maximum de 35 M€.

Ces formations récifales sont sous l’emprise des cyclones et peuvent être fortement impactées par la houle cyclonique. De façon générale, les formes massives à croissance lente (corail cerveau Siderastrea siderea, corail étoilé massif Orbicella faveolata) sont moins sensibles que les formes branchues à croissance plus rapide (Acropora sp.). L’augmentation de la température et l’acidification des eaux marines peut conduire à des phénomènes de blanchissement des coraux, dû à l’expulsion des algues symbiotiques, pouvant provoquer la mort des colonies coralliennes si le phénomène dure trop longtemps.

Les herbiers remplissent des fonctions écologiques essentielles, aussi bien pour les écosystèmes marins que terrestres. Ils sont des espèces ingénieures qui jouent un rôle important en milieu côtier, en contribuant à l’oxygénation des fonds marins (photosynthèse) et en créant un habitat très productif propice au développement de nombreuses espèces animales et végétales. Cet écosystème joue le rôle d’aire de refuge, de reproduction, nurserie et/ou d’alimentation pour de nombreuses espèces d’invertébrés et de poissons dont certaines présentent un intérêt commercial, telles que le lambi Lobatus gigas, l’oursin blanc Tripneustes ventricosus, et de nombreux juvéniles d’espèces de poissons (Acanthuridae, Haemulildae, Scaridae, Lutjanidae, Serranidae…). Des espèces protégées, comme la tortue verte (Chelonia mydas), s’alimentent des feuilles d’herbiers. De plus, les herbiers amortissent les houles et contribuent ainsi à protéger le littoral de l’érosion ou de l’impact de tempêtes ou cyclones. Les herbiers piègent les sédiments dans leur réseau de rhizomes et de racines et contribuent ainsi au maintien de la clarté de l’eau. Ce piégeage des sédiments contribue à limiter également le phénomène d’hypersédimentation néfaste au développement des récifs coralliens.

De par leur localisation, les mangroves agissent comme des barrières physiques naturelles permettant de stabiliser et de protéger les côtes des inondations et de l’érosion. Les enchevêtrements des racines de palétuviers retiennent les apports terrigènes qui y sédimentent, permettant ainsi de diminuer la quantité de sédiments exportés vers le milieu marin et la turbidité des eaux côtières. De plus, les mangroves protègent les milieux côtiers de l’action du vent et de la houle des tempêtes tropicales et des ouragans et peuvent atténuer l’impact des tsunamis (Kathiresan et Bingham 2001). C’est un écosystème à l’origine d’une importante production de biomasse végétale et animale, mais également le support de services écosystémiques culturels et de loisirs.

Ceux sont aussi environ 2 600 emplois, 400 sociétés et 1  000 ménages qui dépendent à différents degrés des services écosystémiques des récifs coralliens et écosystèmes associés de Saint Martin. Près de 20 M€ sont visibles en termes de flux financiers annuels pour l’économie de Saint Martin (via les valeurs ajoutées des services du tourisme et de la pêche liés aux RCEA) tandis que d’autres services, comme la protection contre les inondations côtières et la séquestration du carbone, ne sont pas comptabilisés dans les statistiques économiques. Les principaux services en termes économiques sont le tourisme « bleu » (20 M€/an), la protection contre les inondations côtières (3 M€/an) suivi de la séquestration de carbone par les mangroves et herbiers (3 M€/an).
> Lien sur le rapport de la valeur économique de la réserve naturelle
> Lien sur la plaquette de présentation

GESTION

LES AIRES MARINES PROTÉGÉES

Espaces naturels protégés

Une Réserve Naturelle Nationale est établie et gérée par l’Association de Gestion de la RNSM (AGRNSM), régie par la loi du 1er juillet 1901, créée spécifiquement pour assurer la gestion de cet espace naturel protégé, depuis 1998. Une convention a été mise en place le 6 février 1997 entre l’Etat et l’Association de gestion afin de fixer les modalités de gestion (Annexe 3). Elle sétend sur 3 100 ha, dont 95% de zone marines, 3% de zones lacustres et 2 % de zones terrestres dont des ilets. L’association emploie 8 salariés dont 5 agents commissionnés et assermentés (RNN et Conservatoire du littoral) permanent répartis au sein des Pôles suivants :
Pôle Gouvernance (regroupant les membres du bureau de l’AGRNSM et le Conservateur de la RNN) ;
Pôle Police de la Nature, logistique et aménagement (3 agents);
Pôle Scientifique (2 agents);
Pôle Education et sensibilisation à l’Environnement (1 agent).

https://reservenaturelle-saint-martin.com/

LES RÉSEAUX DE SURVEILLANCE

Réseaux de suivi

Trois réseaux de surveillance pérennes sont à l’œuvre sur les espaces maritimes de ce territoire :
• Le Réseau de surveillance et de suivi de la qualité des masses d’eau littorales dans le cadre de la Directive Cadre sur l’Eau européenne (3 stations, corail, herbier et hydrologie, piloté par l’AFB),
• Le suivi de l’état de santé des communauté benthiques des Réserves Naturelles (6 stations réparties en et hors réserve, corail et herbier, piloté par l’AGRNSM),
• Le Suivi Reef Check Caraïbe antenne St Martin (4 stations en réserve, corail uniquement, piloté par Reef Check France et l’AGRNSM).

PRESSIONS

Plan d'occupation des sols
Pressions sur les bassins versants

ÉTAT DE SANTÉ

Des signes très nets indiquent une dégradation lente mais continue des trois grands types d’écosystèmes de la Guadeloupe. Les communautés coralliennes subissent les pressions anthropiques liées à l’hyper-sédimentation consécutive aux apports terrigènes (travaux de remblais et de déblais) qui affectent le développement des coraux. Les apports d’eau douce (rivières, rejets urbains) et de nutriments (nitrates, phosphates) modifient l’équilibre des milieux coralliens en favorisant la prolifération algale (Dictyota sp., cyanobactéries) au détriment des coraux.

> voir le rapport Etat des récifs coralliens et des écosystèmes associés des outre-mer français en 2015

Depuis Irma, de nouvelle études ont été conduites. Les herbiers ont été faiblement impactés, tandis que du côté des récifs, on observe une réduction de la couverture corallienne, particulièrement marquée hors de la réserve et à proximité de la Baie Orientale, soit moins de 10% de couverture vivante (voir le site de la réserve).

> Voir tous les rapports d’état de santé